20150419 - Lettre aux parlementaires

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Madame, Monsieur le Député,

Vous êtes soumis à maints appels et mails en défaveur de la loi sur la surveillance. Cette loi est bien entendu nécessaire, mais les domaines de l’information, de la communication et de l’intellition (c’est à dire de l’information calculée) qu’elle traite ne sont que très partiellement évoqués par la Constitution (sauf dans la Charte de l’Environnement) et les engagements internationaux de la France (sauf lors des conclusions et engagements du Sommet Mondial sur la Société de l’Information de Tunis, 2005).

Elle déclenche donc un débat sur la souveraineté et la sécurité numérique et digitale de la France et de chacun, un sommet mondial ayant montré et retenu que la Société de l’Information, le nom ainsi donné à notre société « anthropobotique » actuelle (hommes et processus digitaux autonomes), était un multipartieprenariat entre le régalien, le citoyen et le secteur privé. C’est de cela que, sous la pression des circonstances, que nous voulons traiter en urgence.

Nous savons tous que ce n’est pas possible, pour une raison d’expérience comparable, qui est celle de la révolution industrielle, c'est-à-dire de l’introduction de la facilitation technique à l’industrie de l’homme : nous en avons vu les effets politiques, historiques, économiques, constitutionnels et culturels.

Nous sommes aujourd’hui engagés dans plus encore : la facilitation technique du penser humain. Nos amis américains appellent cela la « singularité technologique », ce qui - pour leur école de pensée californienne - va même jusqu’au « post-humain » ! Certes, il nous faut raison et maîtrise garder, mais le domaine est majeur.

Cette maîtrise va sans doute nous demander des décennies voire des siècles à établir. Le point important est que nos tentatives ne nous bloquent pas et que nos rigidités n’avantagent pas nos coopétiteurs politiques (US/BRICS) et industriels. J’ai été bloqué en 1986 parce que, au sein du catalyseur mondial de l’internet d’alors, mes projets n’étaient pas « NSA-compatible » aux yeux du militaro-industriel américain, tandis que mes collègues ou maîtres à penser, dans certains aspects de l’IRIA, de la CII et du CNET, étaient bloqués de même.

Le scénario que je propose au nom des « Relationnels Libres » (la libre recherche en matière de solutions pour le développement des espaces relationnels entre les digitalités de chacun) est simple. Il consiste – conformément aux principes fondamentaux expérimentés lors du développement de l’internet à reconnaître que :

• La Constitution du digital est dans le code source. • Tout algorithme peut être faux, sa validation est dans le « running code » et le « living mode » • L’on doit être conservateur dans ce que l’on envoie et ouvert dans ce que l’on reçoit. • Ce qui est (donnée), ce que l’on reçoit (captée), ce que l’on consolide (traitée) est différent.

Votre loi est un algorithme. Il dit « pour trouver les terroristes utiliser des boîtes noires ». Les instructions complémentaires viendront par décrets, circulaires, et réponses à appels d’offres.

Ce que nous allons faire, dans un souci constitutionnel de défense nationale et de précaution citoyenne, est chercher les bugs de votre algorithme. Soit vous aurez prévu une instance pour les traiter, et nous pourrons coopérer et innover, soit vous ne l’aurez pas fait et nous serons assignés en Justice : ceci nous permettra de soulever les QPC que vous vous êtes refusées.


Comprenons bien que ce que nous avons à trouver tous ensemble, c’est une extension aux Droits de l’Homme dans le cadre de la « présomption algorithmique de culpabilité ». C’est sans doute possible, mais c’est un chemin fondamentalement nouveau.


Juste une remarque, votre loi est une loi d’exception à l’occasion d’une évolution fondamentale de la société humaine, et donc française, qui lui parait propice. Elle ne recherche cependant pas en préalable le consensus constitutionnel qu’elle réclame. C’est une façon de procéder que de brusquer les choses. Les causes similaires ayant parfois des effets comparables, je crains, cependant, que tout à fait mécaniquement (nous sommes ici dans ce qu’en science on appelle l’ « auto-organisation critique ») nous renouions avec une loi sur les suspects et ses conséquences. A nous, politiques et architectoniciens de tenter ensemble de les éviter.

Aristote ne disait-il pas que son architectonique, la discipline de la compréhension de la réalité, était la science de la politique, dont l’art était de conduire la société des hommes libres. La différence est que nous avons digitalement et intelligemment lié ces hommes libres, sans savoir encore bien si ces liens les asservissent ou en étendent les capacités.

Sincèrement votre,